Khalifa Ababacar Sall, candidat à la présidentielle de 2017 ? Ce qui semblait être une simple probabilité, il y a quelques mois, se précise de plus en plus. D’ailleurs, pour le journal français La Lettre du Continent, cette candidature ne fait plus l’ombre d’un doute.
Mieux, parlant des leviers que compte actionner le maire de Dakar pour gagner en 2017, le journal écrit : « Il a créé le mouvement And Dolel Khalifa (Adk) au sein du Ps qui doit lui permettre de rassembler des sympathisants à travers le pays.»
« Le maire de Dakar qui porte le nom du premier Khalife de la communauté Tidiane de Tivaouane (Khalifa Ababacar Sy) entretient des relations étroites avec cette famille, dont son porte-parole Abdou Aziz Sy Junior»,croit savoir le même journal que nous avons repris dans notre édition n°6879 du samedi 21 février.
Et Khalifa Sall espère ratisser au-delà de sa formation politique, le Parti socialiste, avec notamment le soutien de gens comme Cheikh Guèye, « éminent membre de la Ld (Ligue démocratique, Ndlr), éminent parti de la Gauche sénégalaise qui a notamment soutenu Khalifa Sall lors des élections locales de 2009».
Il s’y ajoute d’autres personnalités comme Moussa Tine, patron de l’Alliance démocratique Peñcoo, Moussa Sy, le maire des Parcelles assainies… Mieux, le mensuel Vision Mag a évoqué récemment une rencontre entre Khalifa Sall et Abdoulaye Wilane, promu porte-parole du Ps et présenté comme un des principaux lieutenants d’Ousmane Tanor Dieng.
Inutile de rappeler que le courant ne passait pas trop entre Wilane et Khalifa. Mais les deux hommes ont pu dissiper les malentendus. Ce qui augure d’un rapprochement entre pro-Khalifa et pro-Tanor au sein du Ps. Alors, que peut représenter Khalifa Sall à la présidentielle de 2017 ?
Les observateurs s’accordent au moins sur une chose : Khalifa Sall n’a que peu de chances de gagner en 2017. Et pour cause, son aura se limite à la seule ville de Dakar. Du moins, pour le moment. Pour gagner, il lui faudra donc s’appuyer sur l’appareil du Ps afin d’étendre son envergure au niveau national.
Le Ps étant bien installé à l’intérieur du pays où il garde encore de solides soutiens, notamment au sein des familles maraboutiques. Seulement, cet appareil est sous le contrôle d’un Ousmane Tanor Dieng qui sait bien cacher son jeu. Et Khalifa Sall qui n’a connu que le Ps dans sa vie militante est bien placé pour le savoir. Toutefois, même s’il ne gagne pas en 2017, Khalifa Sall risque de faire beaucoup de mal au Président Macky Sall, candidat à sa propre succession.
Un président sortant ne peut aller au second tour
Macky Sall l’aurait déjà confié à ses proches : un Président sortant ne peut pas prendre le risque d’aller au second tour. Il faut donc gagner partout et espérer passer dès le premier tour. Et gagner partout commence par Dakar, la capitale. Or, une candidature de Khalifa Sall peut faire perdre Dakar à la mouvance présidentielle incarnée par Macky Sall. Il est vrai que Dakar n’est pas que le département. Il est aussi vrai que les réalités d’une présidentielle ne sont pas les mêmes que celles d’une élection locale.
Toujours est-il que Khalifa Sall, maire de Dakar ayant gagné l’essentiel des communes de la capitale avec sa coalition Taxawu Dakar, possède un atout non négligeable pour, à défaut de gagner, faire perdre à Macky Sall la région. Lui qui est presque sûr de pouvoir gagner à Grand-Yoff, son fief, mais aussi aux Parcelles assainies où il peut compter sur le maire Moussa Sy. Ne dit-on pas que qui gagne aux Parcelles, gagne Dakar ? Surtout quand on sait que les milieux urbains votent rarement pour un Président sortant.
Macky Sall le sait mieux que quiconque, lui qui avait battu Wade dans la région de Dakar au premier tour de la présidentielle de 2012 avec un score de 205 338 voix soit 27,42 % contre 189 493 voix soit 25,03 % pour le candidat sortant d’alors. Résultat : même si Wade avait fait des scores plus qu’honorables dans les autres régions (il en avait gagné beaucoup), il lui était difficile de combler le gap de Dakar afin de passer au premier tour. Une candidature de Khalifa Sall peut donc contraindre Macky Sall à aller à un second tour lourd de tous les dangers.
« Même si, tempère un observateur de la scène politique, tout dépendra des écarts entre les scores des candidats.» Autrement dit, il faudra pour le candidat sortant, à défaut de gagner, faire tout pour ne pas perdre avec un écart important. Il s’y ajoute que l’actuel locataire du palais de l’avenue Léopold Sédar Senghor est loin d’être sûr de gagner cette épine dorsale qui concentre l’essentiel de l’électorat et qui pourrait lui permettre de combler un éventuel gap.
Il s’agit évidemment de Dakar, mais aussi du centre avec Thiès, et du pays mouride (Touba, Mbacké, Diourbel…). A ces zones qui polarisent plus de 50 % de l’électorat, il faut peut-être ajouter Mbour où le Ps reste fort, même si l’Apr y fait son chemin grâce au ministre Oumar Youm. Mais, même si son électorat a tendance à s’effriter, Idrissa Seck a de réelles chances de gagner encore à Thiès et environs.
Quant au Baol, il est inutile de dire que les mourides n’ont pas un amour fou pour Macky Sall. Même si le clergé mouride tente de sauver les apparences, de sérieux malentendus subsistent entre la communauté mouride et le pouvoir de Macky Sall. L’ayant compris, Macky Sall va offrir à l’électorat mouride une autoroute Thiès-Touba. Il reste que le pays mouride est loin d’être acquis pour Macky Sall. Ainsi, perdre des zones comme Dakar (à cause de Khalifa Sall), Thiès et le Baol contraindrait, à coup sûr, Macky Sall à aller au second tour. Et bonjour les dangers.
Wal Fadjri